Au cours du XVIIIe siècle, beaucoup
d’aristocrates anglais cédèrent à la mode de faire construire dans les parcs de
leurs châteaux, en plus d’autres "folies", des ermitages. Ces
constructions, fausses grottes ou simples cahuttes, étaient parfois décorées
d’ossements. Afin d’en renforcer l’effet, on décida de payer des pauvres gens, de
préférence barbu, déguisés en ermites négligés. Ils y faisaient de la
figuration pour les promeneurs, et déambulaient dans les allées avec interdiction
de parler. Le concept "d’ermite d’ornement", ou "ermite de jardin", était né. Trouver
de bons candidats était compliqué, et beaucoup d’ermites furent licenciés car
trop souvent aperçus dans les pubs des alentours. En 1730, la reine Caroline,
épouse de George II d’Angleterre, embaucha pour son ermitage de Richmond Park
le poète Stephen Duck. Parfois, fatigués des frasques de leurs ermites,
certains propriétaires les remplaçaient par des mannequins de cire. Un certain John
Hill alla même jusqu’à engager un vrai religieux, le Père Francis. Quand ce
dernier mourut, après 14 ans de service, il en fit faire une marionnette,
agitée devant les visiteurs par un manipulateur caché derrière qui en même
temps récitait des vers. Il faudra attendre la fin de l’ère romantique, vers
1850, pour que l’intérêt pour les ermites de jardin commence à décliner.
Reconnaissons que la mode
contemporaine des nains de jardin est beaucoup plus commode.