Dans
la série des femmes de lettres du XVIIIe siècle bien oubliées, voici Marie-Anne-Henriette
de Payan de l’Estang, épouse Ribière (ou Ribère) d’Antremont (marquise
d'Antremont), puis de Bourdic, puis Viot. Elle était née à Dresde en 1746, de parents peu fortunés originaires du Dauphiné. Elle
est décédée au château de la Ramiere, près de Bagnols (Gard), en 1802.
Elle fut mariée à l’âge de 12 ans – oui, vous avez
bien lu, 12 ans ! - au marquis de Ribère-d'Antremont. Il la laissa veuve à
seize ans. Elle se remaria avec le baron de Bourdic, major de la ville de
Nîmes, après la mort duquel elle épousa M. Viot, commissaire des relations
extérieures à Barcelone.
Madame de Bourdic-Viot, qui connaissait le latin,
l'allemand, l'anglais et l'italien, ainsi que la musique, fut une femme de
lettres très estimée en son temps, en relation épistolaire avec des
personnalités aussi célèbres que Voltaire, qui l’encouragea, Thomas Jefferson,
Saint-Just ou Benjamin Franklin.
Elle était connue pour son esprit que son
amabilité, et ses poèmes ont été beaucoup publiés dans l’Almanach des Muses, une
revue poétique fondée en 1765 par Sautreau de Marsy (1740-1815, journaliste et
homme de lettres). Cette revue, souvent critiquée pour son côté éclectique
(certaine mauvaises langues la surnommaient l’almanach des buses !) connut
un succès considérable jusqu’à sa disparition en 1820.
Voici
un extrait de son Épitre à ma Muse :
"(…)Je
reste dans ma solitude ;
J'y
trouve ma tranquillité ;
Un
sort exempt d'inquiétude
Vaut
mieux que la célébrité.
L'ombre
s'accroît, et le silence
Descend
de la voûte des cieux ;
Le
jour fuit, et la nuit commence.
Règne
avec elle dans ces lieux,
Sommeil
; aux loisirs studieux
Fais
succéder la nonchalance
Et
le repos voluptueux.
Tu
m'entends... déjà la paresse
Couronne
mon front de pavots ;
En
touffe de fleurs la mollesse
S'enveloppe
dans mes rideaux,
Et,
cédant au dieu qui la presse,
Tombe
et s'endort sur mes pinceaux."
Illustration : École française du XVIIIe siècle – Euterpe, muse de la musique. Collection particulière.